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04 novembre 2003

Compte rendu du dîner-débat du 16 mars 1999 avec Christian SAUTTER Secrétaire d'Etat au Budget

organisé par le Club PANGLOSS (Anciens Lauréats de la FNEP, Fondation Nationale Entreprise et Performance) & l’ASTEC Association des Anciens Élèves de l’ENSAE


On n'a pas nécessairement la chance d'avoir tous les jours un ministre à sa table... Les anciens élèves de l'ENSAE - regroupés au sein de l’ASTEC - et les anciens lauréats de la Fnep ou Club PANGLOSS, eurent cette opportunité le mardi 16 mars 1999 dans le cadre d'un dîner débat avec Monsieur Christian Sautter, Secrétaire d'État au Budget, qui consacra une soirée à nous expliquer les charmes et les mystères du budget. Ancien élève de l'Ecole Polytechnique et de l'ENSAE, le Ministre, après un parcours allant du Secrétariat général de la Présidence de la République à la Préfecture de la Région Île de France, manie les chiffres avec aisance pour répondre à de nombreuses questions qui, « à la différence de la télévision », n'avaient pas été préparées à l'avance. Bel effort de sincérité et de spontanéité que l'on put apprécier au cours de cette soirée...

Dans le désordre et pour se mettre en appétit, quelques chiffres pour mettre nos idées au clair sur le thème de la soirée : « un budget pour la croissance et l'emploi». La croissance de l'investissement productif, faible durant les années 90, s'est réveillée en 1998, sans que l'on sache vraiment si le mouvement sera pérenne et si les modèles économétriques sont toujours pertinents pour apprécier les effets induits de l'investissement productif, selon qu'il est généré au titre de l'industrie manufacturière ou des services... Néanmoins ﷓ malgré cette difficulté méthodologique parfaitement surmontable pour la soirée ﷓nous apprendrons que 300 000 emplois furent créés en 1998. Les dépenses au titre de I’emploi, de l'éducation nationale, de la recherche, de la sécurité et de la justice croîtront en volume de 30 milliards face à une charge de la dette qui en représentera 237 en 1999... Le budget aura une croissance en volume de 0 % en 1998, de 1 % en 1999 et de 1 % pour l'ensemble des trois années 2000 à 2002... Les impôts n'évoluent pas nécessairement dans le sens que tout contribuable hargneux espère : la TVA, la taxe professionnelle sont en baisse tandis que le Ministère des Finances s'ingénie à trouver les chemins d'un rééquilibrage de la fiscalité entre revenu du capital et revenu du travail. Les contrôles fiscaux qu'un convive souhaitait voir renvoyés aux oubliettes génèrent environ 73 milliards de recettes : comme, le rappellera le Ministre, on aime généralement d'autant moins les contrôles fiscaux qu'ils sont efficaces. Le Ministre compatira, en réponse à une question, sur le sort fiscal français, particulièrement injuste, fait aux contribuables célibataires gagnant plus de... 50 000 FRF par mois... En revanche, les quelque 760 000 associations ﷓ employant 1,3 millions de personnes et 7 millions de bénévoles ﷓ ont vu leur horizon se clarifier en 1998 par une instruction fiscale en date du 15 septembre de ladite année. Selon leur caractère « un peu, modérément ou passionnément lucratif» les associations bénéficieront de foudres fiscales adaptées à la réalité de leur situation et à leur activité. Afin de contribuer à une remise en ordre du monde associatif, celui-ci se verra accordé un grand « pardon » (fiscal) par un effacement des dettes fiscales résultant d'une situation antérieure que l'État s'était peu efforcé de clarifier.

Derrière l'abondance de chiffres, le Ministre rappelle quelques principes que nous aurions pu perdre de vue : 1998 fut la meilleure année en termes de taux de croissance de la décennie des années 90, croissance due à une politique de stimulation de la demande à travers le levier fiscal, notamment par le crédit d'impôt « entretien », la suppression de la TVA sur les terrains à bâtir et la baisse des droits de mutation...

Le budget de l'État, dont le Ministre a la charge, se veut un instrument de croissance mais aussi de solidarité grâce à des efforts allant dans le sens d'une volonté de «dépenser mieux», c'est-à-dire dans un sens « plus social »... Et pour cause : le chômage et l'emploi furent largement abordés dans les questions des convives. Le Ministre prendra ses distances avec la proposition d'un participant visant à résoudre le sort des « 4 millions de chômeurs » par le maniement, un peu directif, d'une règle simpliste consistant à diminuer les salaires pour les affecter d'une manière un peu « militaire » à des emplois qui pourraient être créés en contrepartie. Un détour par les enseignements du rapport Malinvaud permettra de se souvenir que la croissance seule ne permettrait pas de résoudre l'ensemble du problème du chômage et qu'il n'est pas simple d'aller chercher les recettes compensant les exonérations accordées en vue de favoriser la création d'emplois pour les chômeurs non qualifiés. Entre cotisations assises sur la valeur ajoutée ou modulation des taux de cotisation en fonction des revenus, personne n'a pu encore dire quelle était Ici meilleure solution. De la même manière, et invoquant la citation du Premier Ministre - « oui à l'économie de marché, non à la société de marché», le Ministre rappellera la latitude d'appréciation qu'il garde face au modèle américain invoquée de manière laudative par certaines questions à la tonalité fortement « entrepreneuriale » et parfois étayées par une foultitude de chiffres.
Christian Sautter est aussi un expert de l'économie nippone : directeur d'études sur l'économie japonaise à l'École des Hautes Etudes en Sciences Sociales, il avouera sa difficulté à porter un diagnostic sur la nature des problèmes que rencontre l'économie japonaise et nous ne saurons pas si le Japon « est malade faute d’avoir lu la Harvard Business Review» et ses recettes de potion économique magique, ou s'il trouvera un nouveau « meiji ». Pour l'instant, considérons simplement de fait que l'injection de fonds par le gouvernement japonais (57 milliards d'EURO) dans le système bancaire japonais équivaut de fait à quelque chose qui ressemble une « nationalisation » du système bancaire...

Le feu d'artifices pour clore cette soirée aurait pu être la question relative à « l'Europe » ou aux 35 heures : faute de temps nous y avons échappé ! Pour ces deux thèmes, on se limitera à dire que dans le cadre des négociations « agenda 2000 » la position française est d'arriver à stabiliser les dépenses en « euros constants » et qu'il existait de bonnes chances que le dossier soit bouclé d'ici que les participants aient pu prendre connaissance ce compte rendu. Pour les 35 heures, le Ministre annoncera une « seconde loi » sans en dévoiler le contenu ... Affaire à suivre pour les afficionados du sujet.

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